Interview du Docteur Bernard Fleury, Pneumologue, Président de la SFMDS
Pourquoi un médecin pneumologue est –il impliqué dans la prise en charge du ronflement et des apnées du sommeil ?
Il y a 30 ans, le jeune spécialiste en pneumologie que j’étais a eu la chance de voir s’ouvrir un vaste et nouveau champ d’investigation médicale, l’exploration des troubles respiratoires du sommeil. Le ronflement souvent plaisanté s’avérait le symptôme d’une pathologie grave, le syndrome d’apnées du sommeil. Au fil des années, notre connaissance sur la prévalence de la maladie, sur ses conséquences graves dominées par la somnolence diurne et les maladies cardiovasculaires (Hypertension artérielle, insuffisance coronarienne, accident vasculaire cérébral, trouble du rythme cardiaque) ont fait prendre conscience de la place de choix du syndrome d’apnées du sommeil parmi les grands problèmes de santé publique. Selon une étude récente réalisée par l’Institut de Veille Sanitaire (la prévalence des symptômes évocateurs de syndrome d’apnées du sommeil dans la population générale française était de 4,9 % [IC 95 %: 4,5–5,3] (hommes 7,3 %, femmes 2,8 %). Cette prévalence des symptômes évocateurs de syndrome d’apnées du sommeil était de 8 % chez les hypertendus et de 11 % chez les obèses. Il faut noter que seuls 15% de ces sujets, a priori apnéiques, avaient bénéficié d’une exploration. Il reste donc un important travail d’information sur cette maladie, à la fois auprès du public mais aussi des soignants à faire.
Personnellement, mon activité professionnelle, s’est progressivement orientée vers un exercice uniquement consacré à la prise en charge de cette pathologie.
Pourquoi avez-vous décidé avec des confrères odontologistes et ORL et chirurgiens maxillo-faciaux de créer la Société Française de Médecine Dentaire du Sommeil ?
La collaboration interdisciplinaire entre les médecins impliqués dans la prise encharge des troubles du sommeil, les odontologistes (dentistes-orthodontistes), stomatologistes, les ORL et les chirurgiens maxillo-faciaux est nécessaire pour une prise en charge optimale de ces patients. Le traitement de l’obstruction pharyngée intermittente favorisée par le sommeil qui sous tend le ronflement et les apnées repose soit sur un traitement pneumatique (la Ventilation en Pression Positive Continue), soit sur une approche chirurgicale de la luette et/ou des amygdales, soit sur une avancée de la mandibule, permanente grâce à une chirurgie d’avancée maxillo-mandibulaire ou transitoire durant le sommeil grâce à une orthèse d’avancée mandibulaire.
Le rôle des odontologistes est capital. Ils sont les seuls en mesure de prendre en charge la réalisation et la surveillance du traitement par orthèse d’avancée mandibulaire. Ils assurent la préparation orthodontique à la chirurgie d’avancée bi-maxillaire.
C’est pourquoi, dans un premier temps, nous avons crée il y a trois ans, un Diplôme Inter Universitaire (UFR d'Odontologie Garancière-Paris VII, Hôpital Saint Antoine-Paris VI, CHU d’Angers) pour donner à nos confrères odontologistes une formation théorique et pratique à la prise en charge de ces patients.
Il faut ajouter un rôle de prévention très important dévolu aux odontologistes : reconnaître chez l’enfant les anomalies morphologiques maxillo-mandibulaires dont on sait qu’elles aboutiront chez l’adulte au développement des obstructions pharyngées itératives du syndrome d’apnées du sommeil.
Face à ces réalités et à l’intérêt croissant des différents spécialistes pour cette activité interdisciplinaire, nous avons décidé de créer un lieu d’échanges scientifiques et de formation : la Société Française de Médecine Dentaire du Sommeil. L’ancienneté de mon implication dans la prise en charge clinique de cette maladie et de mon activité de recherche m’ayant permis de tisser des liens étroits avec les spécialistes français des troubles du sommeil ont motivé ma désignation comme Président de la Société.
Quels sont vos objectifs immédiats ?
L’objectif du président est bien sur de convaincre le plus grand nombre possible de nos confrères de nous rejoindre pour que cette société soit rapidement une société vivante lieu d’échanges interdisciplinaires intenses et constructifs, qu’elle puisse permettre à une information fondée sur les preuves scientifiques de se répandre dans notre communauté de soignants, qu’elle puisse promouvoir des études rigoureuses et des règles de bonne pratiques reconnues.
Dans l’immédiat, notre énergie se concentre d’une part, sur l’organisation la réunion inaugurale du 10 mai 2012 au cours de laquelle sera présentée notre jeune société à l’occasion de la remise des diplômes aux deux premières promotions du DIU TOSSAOS et d’autre part sur la préparation de la première journée scientifique de la Société, le 22 novembre 2012 dans le cadre du Congrès annuel du Sommeil à Bordeaux.